18.1.08

L'ordre géofinancier mondial est bouleversé

Le journaliste Pierre-Antoine Delhommais dans sa dernière chronique économique :

"La crise des subprimes a mis en évidence le bouleversement de l'ordre géofinancier mondial. L'affaire était déjà entendue sur le plan économique. L'Asie fabriquait, l'Occident consommait. D'où les déséquilibres colossaux des balances commerciales entre les deux zones. Mais personne n'avait vraiment réalisé à quel point l'Asie émergente, puissance industrielle, était aussi devenue une puissance financière. Comment, à force de beaucoup travailler, elle s'était beaucoup enrichie. Comment, à force de vendre des milliards de tee-shirts, elle avait aussi patiemment versé dans sa tirelire des centaines de milliards de dollars laborieusement gagnés. On savait bien que la banque centrale de Chine accumulait les réserves de change (près de 1 500 milliards de dollars), mais comme celles-ci servaient pour l'essentiel à acheter des emprunts d'Etat américains, ce phénomène restait une sorte d'abstraction monétaire.

Tout a changé le 19 décembre 2007, quand China Investment Corp (CIC), le fonds de l'Etat chinois, a apporté 5 milliards de dollars à Morgan Stanley, " plombée " par ses pertes liées aux subprimes. De l'argent communiste sauvant l'un des établissements financiers les plus chics de Wall Street, une vraie Rolls du capitalisme mondial pour laquelle des générations de golden-boys ont rêvé de travailler, le symbole est fort. (…) On pourrait égrener d'autres signes de cette puissance financière asiatique toute neuve. Quatre entreprises chinoises figurent parmi les dix plus grosses capitalisations boursières mondiales : au premier rang d'entre elles, PetroChina, valorisée 724 milliards de dollars, loin devant les Américains ExxonMobil (519 milliards) et General Electric (377 milliards). Début décembre, la Chine est également devenue pour la première fois, dans le cadre de l'Association internationale de développement (AID) gérée par la Banque mondiale, l'un des 45 pays donateurs pour les pays les plus pauvres de la planète. Il y a huit ans, elle était encore bénéficiaire de cette aide ! Par ce geste, la Chine a voulu bien faire comprendre à toute la planète qu'elle avait définitivement quitté le camp des nations en développement pour rejoindre celui des pays riches. (…) Vendre des tee-shirts, cela peut finir par rapporter gros, très gros."

Source : Le Monde, 06/01/08

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Anonymous Anonyme a écrit...

Bien sûr, c'est important. Entre une zone qui vend des produits industriels, une autre qui vend ses ressources naturelles, et une troisième qui brûle en Irak l'argent qu'elle n'a pas, ce sont évidemment les deux premières qui détiennent le pouvoir financier.

Je relativiserais tout de même l'explication par les tee-shirts et les volumes de travail. Car si l'on raisonne "course à la productivité", l'Ouest reste bien plus productif par habitant, que l'Extrême-Orient. On voit alors qu'il s'agit d'un simple rééquilibrage par rapport au 20ème siècle : dans la mondialisation, les enfants qui naissent ont des chances de plus en plus égales de gagner leur vie (mais aussi une perception de plus en plus vive des inégalités et injustices). En raisonnant très sommairement, des pays qui représentent 20% chacun de la population mondiale, Chine et Inde, devraient, sauf autodestruction, aller vers 20% chacun de la puissance mondiale.

21/1/08 09:23  

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