21.9.06

La délinquance des jeunes n'est pas une fatalité

" Entre 2000 et 2005, les mineurs mis en cause dans les enquêtes de police sont passés de 175 000 à 194 000 par an. Le tableau présentant une jeunesse happée par la délinquance est faux, car on reste sur des populations minoritaires (la France compte 8 millions de 13-25 ans). Mais la progression est réelle… Dans le délit se loge le mépris de l'autre. Notre délinquance est d'abord contre autrui, et secondairement contre l'Etat. Elle renvoie donc à une véritable crise de la capacité à vivre ensemble, que l'on n'arrive pas à rabattre sur une seule cause, économique, sociale ou idéologique. Cela me paraît lié à une fragmentation sans précédent de la société. Les individus s'écartent les uns des autres. Ils sont encouragés à perdre de vue leur dépendance. Je pense, à l'inverse de la thèse foucaldienne d'une société transparente sous surveillance complète, que la société est plus complexe, plus obscure. Nous sommes dans des labyrinthes, des espaces urbains non verrouillés, où beaucoup d'endroits, cachés, demeurent vides d'uniformes et de "garants ". D'autres phénomènes, tels que le supercapitalisme amoral, la démesure consommatrice, le cynisme tacticien des politiques, jouent sur les individus les plus fragiles… Ouvrir les yeux sur la complexité du phénomène criminel, c'est reconnaître les marges de manoeuvre et les choix individuels. La délinquance et la violence ne sont des fatalités ni de la pauvreté, ni de la jeunesse, ni de l'immigration. Admettre le jeu de ces libertés relatives est la seule façon de justifier le volontarisme éducatif dans la prévention comme dans la répression. " Dixit Didier Peyrat, vice-procureur chargé des mineurs au tribunal de grande instance de Pontoise. (lemonde.fr, 10-11/09/06)

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