10.3.06

Désarroi

" Nous sommes entrés, qu'on le veuille ou non, dans une époque soupçonneuse, désenchantée, critique jusqu'à la dérision. Notre époque devient celle des « petits malins » à qui l'on ne mentira pas deux fois. Nous nous voulons les procureurs intraitables de toutes les illusions, les spectateurs sarcastiques de l'Histoire. Électeurs, nous nous flattons de ne plus faire confiance aux élus. Contribuables, nous soupçonnons l'État de tous les gaspillages. Citoyens, nous jugeons notre démocratie menteuse et corrompue. Malades, nous nous méfions des médecins. Justiciables, nous ricanons de la justice. Parents, nous imaginons que l'enseignement tout entier n'est plus qu'un lamentable échec. Cette volonté de lucidité absolue débouche sur une sorte de mollesse indécise qui nous rend d'autant plus vulnérables. En notre for intérieur, nous jurons que l'on ne nous grugera plus. Nous nous méfions d'instinct de toute conviction collective. Nous campons étourdiment dans une espèce de scepticisme revenu de tout. Tel est bien le désarroi qui habite la société occidentale. " Dixit Jean-Claude Guillebaud dans son dernier bloc-notes. (La Vie, 02/03/06)

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