A l'égal des hommes

" Les femmes ne sont plus ce qu'elles étaient. Longtemps, les hommes les ont rangées en deux catégories, et le verbe " ranger " est déjà tout un programme… Il y avait les " mamans " et les " putains ". Les premières étaient hissées sur l'Olympe et vénérées ; les secondes, ostracisées et bafouées. A regarder en arrière, ce temps-là était doux et simple. Il y avait le Bien et le Mal, et les hommes profitaient des deux. Insensiblement, les choses ont changé. Après les mamans et les putains, on traite désormais avec des " mères-au-travail " et des " monstrueuses ". C'est un glissement considérable, aveuglant. Et pour ceux qui décidément ne voudraient pas le voir, l'actualité insiste lourdement… Lynndie England, Myriam Badaoui-Delay… Au fil de l'actualité, on découvre de plus en plus d'exemples similaires. A chaque fois, on éprouve un instant de doute, de flottement, d'incrédulité. On songe une fraction de seconde aux sorcières de jadis, ces jeteuses de sort, ces trafiqueuses d'élixirs, qui incarnaient la face noire du sacré et se retrouvaient trop souvent ligotées sur des bûchers. Mais cela n'a rien à voir. Voilà le temps des femmes criminelles, loin de l'image des femmes parfaites et pures. Voilà le temps des " monstrueuses ", à l'égal des hommes. " Dixit le journaliste Laurent Greilsamer. (Le Monde, 06/12/05)